Doit-on faire de la motricité libre à tout prix pour bébé ?
Oui… et non…
D’abord, de quoi parle-t-on ?
La motricité libre est un concept pas si neuf que l’on doit à Emmi Pickler, pédiatre qui dirigeait une pouponnière à Budapest dans les années 1950 : Loczy. Ses recherches ont mis en évidence l’importance de l’activité libre et spontanée de bébé pour un développement harmonieux de ses compétences motrices et psychomotrices. Ce qui est confirmé aujourd’hui par les neurosciences.
Le concept consiste donc à NE PAS enseigner, NE PAS guider la motricité du bébé.
On laisse l’enfant réaliser ses découvertes et apprentissages tout seul, lorsqu’il y est prêt.
Même si belle-maman vous fait remarquer que c’est plus tard que ce qu’a fait son fils adoré…
Il en découle un certain nombre de préceptes :
- on ne met pas le bébé dans une position qu’il ne sait pas adopter de lui-même (ex : on n’assied pas un bébé qui ne sait pas s’asseoir seul)
- on proscrit tout matériel de puériculture susceptible d’entraver la mobilité de l’enfant (transat, cocoonababy, coussin, trotteur, cale-bébé, youpala…)
- on favorise un habillement et des chaussures souples
- on évite l’excès de jouets au tapis
- on évite de faire à sa place
- on laisse l’enfant jouer librement, sans intervenir outre mesure (sans intervenir, ce n’est pas sans interaction avec l’enfant !)
On a souvent tendance à oublier que ce qu’Emmi Pickler a mit en avant dans ses découvertes, c’est qu’il faut un environnement psycho-affectif et matériel favorable à son développement.
Il s’agit donc d’éviter toute entrave dans la motricité de l’enfant, cette entrave pouvant être matérielle, mais aussi affective, psychologique ; et j’irai même plus loin, l’entrave peut aussi être sensorielle (par des manipulations inadaptées de l’enfant par l’adulte ou par un handicap sensoriel de l’enfant) ou intrinsèque au corps de l’enfant (tensions corporelles parasitant ses mouvements – ex : torticolis, plagiocéphalie, RGO, fracture de clavicule ou lésion du plexus brachial à la naissance, prématurité, naissance instrumentalisée et/ou gémellaire, réflexes archaïques trop/pas assez présents, ou toute autre pathologie…).
Donc oui, il faut favoriser la motricité libre.
Ça c’est le plan A.
Quand la relation parent-enfant est saine, que l’enfant est environné par un matériel adapté (parfois un simple tapis de jeu textile va être une entrave : ça plisse et roule quand l’enfant veut se retourner, ça le gêne), que les parents ont des manipulations adaptées de leur bébé, que le bébé est en bonne santé et n’a pas de tensions corporelles parasitant ses mouvements.
Et dans ce plan A, il faut constamment observer l’enfant, pour s’assurer que son développement se passe bien, et avance.
C’est l’art de l’inactivité intelligente, cher à @quantikmama pour les personnes accompagnant un enfantement que je détourne sur la motricité de bébé !
Un bébé trop calme, trop observateur, dont le développement moteur prend du retard peut nécessiter un coup de pouce. Et doit questionner. Toujours. Est ce que son environnement est favorable ? Peut-on aider les parents ?
Un bébé qui trouve comment se retourner vers sa droite, mais pas vers sa gauche, nécessite un coup de pouce.
Un nourrisson qui porte toujours la même main à la bouche et jamais l’autre, nécessite un coup de pouce.
Un nouveau-né qui a la tête toujours tournée du même côté nécessite un coup de pouce.
Un bébé qui ne relève pas les jambes, n’attrape pas ses pieds lorsqu’il est allongé ou qui cabre en hyperextension dès qu’il est dans les bras ou qui pleure dès qu’il est allongé sur le dos et/ou sur le ventre nécessite un coup de pouce.
Et là on passe au plan B.
Le plan B, c’est la stimulation sensorimotrice.
Pour donner une comparaison :
- le plan A, c’est quand vous laissez votre enfant faire ses devoirs en autonomie, tout en restant disponible pour interagir avec lui durant ses leçons et exercices
- le plan B, c’est quand vous vous asseyez auprès de votre enfant pour l’aider dans ses devoirs : vous ne faites pas à sa place, vous le guidez ; vous ne le portez pas sur le chemin, vous lui donnez la main.
La stimulation sensori-motrice, de quoi s’agit-il ?
Pour faire simple, il s’agit de montrer au bébé quel « chemin » moteur il empruntera pour faire tel ou tel mouvement, voire séquence de mouvement. Ou de stimuler l’utilisation d’un chemin moteur sous-utilisé par un bébé.
Exemple : un bébé qui a un torticolis avec la tête toujours tournée à gauche verra peu sa main droite entrer dans son champ de vision au gré de ses mouvements aléatoires au départ ; en revanche, il verra souvent sa main gauche et donc se l’appropriera de plus en plus et on verra apparaître progressivement une sur-utilisation de sa main gauche, au détriment de sa main droite (je précise que les bébés ne sont ni droitiers ni gauchers encore) qu’il va négliger de plus en plus, perdant en compétences ; on pourra alors amener le bébé à découvrir, utiliser sa main droite, en l’attirant avec des jouets, tout en maintenant sa main gauche le long du corps.
Autre exemple : un bébé qui ne trouve pas du tout comment se retourner du dos vers le ventre, on pourra le manipuler à partir du bassin et des jambes pour lui montrer l’enchaînement de mouvement qu’il doit faire pour réussir à se retourner et progressivement on l’aidera de moins en moins au niveau de son corps et on l’attirera de plus en plus avec un jouet placé de façon stratégique pour l’inciter à se tourner.
Cette stimulation sensori-motrice doit toujours s’associer à :
- éliminer les tensions parasites qui perturbent la découverte motrice du nourrisson
➡️ kinésithérapie pédiatrique +++, éventuellement associé à ostéopathie pédiatrique - enseigner aux parents comment stimuler le bébé dans leur quotidien, aménager l’environnement, les informer du développement moteur, etc…
➡️ kinésithérapie pédiatrique encore
Cela dit, le meilleur plan en réalité, c’est le plan P : Prévention
Les études montrent qu’avec des ateliers d’informations aux parents sur la motricité libre, le positionnement du bébé et son développement moteur, on diminue drastiquement l’incidence des plagiocéphalies, torticolis, et autres retard moteur simple…
Informons les parents de ce qu’est la motricité libre, des pièges marketing du matériel de puériculture, expliquons-leur qu’ils doivent mettre leur enfant sur le ventre, sur les côtés, pendant les temps d’éveil et sous surveillance, rappelons-leur que le portage c’est tellement génial (et non ça ne rend pas les enfants capricieux de beaucoup les porter, bien au contraire…), montrons-leur qu’avec des manipulations simples du quotidien (comment le changer, l’enrouler, l’attraper dans son berceau…), on peut stimuler son éveil moteur et favoriser son développement
Vous vous posez des questions sur le développement moteur de votre bébé ? Vous attendez un enfant et souhaitez vous informer ? L’atelier Développement du Bébé est fait pour vous !
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